Océan de mémoires
Retour sur le Titanic, celui de James Cameron, quelques années
sans l'avoir revu. Après plus de trois heures de traversée le voyage est toujours aussi spectaculaire et émouvant. Plaisir
de revoir Léonardo Di Caprio et Kate Winslett, traits encore
juvéniles, au début de leur carrière, couple mythique hollywoodien
ayant attiré les foules en 1998, année de sortie du film en France.
Mais ce qui retient le plus c'est cette
impressionnante reconstitution du naufrage basée sur des images
réelles de l'épave, reposant à 3821 m de fond au large de
Terre-Neuve. Des prises de vues que le réalisateur a fait émerger
pour témoigner de la mémoire du navire transatlantique. A noter les nombreuses séquences éblouissantes consacrées à la
splendeur du paquebot, notamment les fondus enchaînés entre les
images de l'épave envahie par des stalactites de rouilles ; la
cheminée de l'appartement de Rose, la passerelle de commandement, la
proue, les différents ponts promenades, le grand escalier en bois ;
et la « résurrection » de ces organes, où chaque partie
du navire redevient ce qu'il était auparavant. Un sidérant retour
dans le passé à la manière d'une entropie inversée.
En 1996, passionné par les histoires
de fonds marins, James Cameron (Abyss, 1989) était descendu visiter
l'épave cherchant sans doute à se confronter au réel du naufrage
et à s'imprégner de l'histoire du navire et de ses derniers
occupants. Embarqués tous deux à bord du Titanic, Jack et Rose,
deux voyageurs que tout oppose à priori, deviennent sous la plume du
réalisateur un couple tragique. L'un ayant gagné sa place en jouant
aux cartes, voyant en cette traversée l'espoir d'une vie meilleure,
l'autre, future mariée à regret, n'y voyant qu'un voyage de
plus, contraignant, sans réelle perspective.
Des images aux tons pastels sur fond de
coucher de soleil aux images sombres et bleutées des corps transis
de froid accrochés à la poupe du navire, il y a un magnifique
contrepoint, celui de la voix âgée de Rose (Gloria Stuart), survivante du naufrage,
regard témoin embrassant tout le film, superposant passé et
présent. Elle raconte toute l'histoire de son périple, de son
embarquement à Southampton, sa rencontre avec Jack, jusqu'à son
sauvetage par le Carpathia et son arrivée à New-York avec en poche
le fameux Cœur de l'océan.
En toute fin arrive alors un moment clef, un instant prégnant, où l'on comprend que tout est affaire de mémoire, de point de vue et de temporalité. Rose s'endort et
rêve de sa rencontre éphémère avec Jack, cherche la porte menant
au grand escalier, une foule l'y attend, tous les personnages du film en fait. Avec tout en haut de cette haie d'honneur, son amour disparu, dos
tourné, habillé comme à la première rencontre, regardant les
aiguilles de l'horloge, comme s'il l'avait attendu depuis tout ce
temps. Unis à jamais dans les songes. Mais cette vision a un point d'origine. C'est en vérité un dessin qui permit à Rose de raviver tous ses souvenirs et de s'y replonger.
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